Nous vous proposons un premier retour sur la première rencontre du 11 janvier 2019 à la Halte-garderie la petite farandole (Les Pennes-Mirabeau) avec l’association Réso-nance dans le cadre du projet Art ’in box.
Le contexte avant la séance
Les deux artistes, Anthony et Eric, arrivent avec leur matériel. Les enfants déjà présents dans l’institution sont en sieste, d’autres vont arrivés un peu plus tard. Le choix est fait d’installer le matériel dans une salle qui permet une certaine pénombre (pour faciliter les projections d’image). Je demande aux artistes comment ils ont anticipé leur intervention, ils pensent s’appuyer sur les enseignements de la séance du matin à « la renardière » (crèche de la ville des Pennes-Mirabeau) en faisant un petit tour d’horizon des différents outils dont ils disposent.
Une remarque d’Anthony permet de comprendre qu’il est plutôt satisfait de ce qui s’est passé en matinée avec des enfants plus grands que ceux qui vont arriver : « Ce matin, c’était très calme et très coopératif » (dixit Anthony).
En parallèle, une partie de l’équipe de la garderie a organisé un accueil pour les enfants qui arrivent de l’extérieur. Je crois comprendre que cet accueil était aussi destiné aux artistes mais le temps d’installation de leur matériel n’avait pas été pris en compte (environ 30 minutes). Pour autant, je trouve que l’initiative est intéressante notamment en ce qui concerne la prise en compte de l’arrivée d’éléments extérieurs au sein de l’institution, chose qui n’est jamais banale. Il y a ici une forme de considération de ce projet naissant qui me parait incontestable même si cela se traduit différemment selon les professionnelles. Je note sur ce point qu’il y a dans cette équipe des actes « intuitifs » qui entrent vraiment dans une dynamique de projet, ce qui n’est surement pas le fruit du hasard.
Pour revenir sur l’accueil, la forme choisie mêle musique, danse, bouts de papiers, de plastiques, des plumes et autres éléments. J’entends la directrice Geneviève Fromentin dire « cet accueil c’est l’inverse du numérique »; une membre de l’équipe ajoute « oui, c’est naturel ». Comme s’il y avait une volonté de jouer sur le cadre avant d’entrer dans la phase suivante qui, rappelons-le, relève du mystère pour tous les adultes présents. Les enfants, eux, ne se doutent de rien et vivent le moment.
La séance en elle-même
L’installation est prête, les enfants sont menés dans la salle qui est assez obscure. Certains entrent directement, d’autres hésitent. Une petite fille préfère même rester à l’extérieur pendant une dizaine de minutes. Un détail m’a semblé important, c’est la possibilité pour les enfants de rester dans la salle d’à coté ou de rentrer-sortir à leur guise.
Il est certain que l’obscurité peut faire peur à des enfants de ces âges, c’est une donnée à prendre en compte. Cela dit, la grande majorité du groupe ne semble pas avoir été concerné par cette crainte.
La salle est donc obscure, il y a une projection de nounours dans un univers numérique accompagnée d’un son de grillon. Dans la première phase, l’interaction est incontestable et différents outils sont testés. Les adultes stimulent les enfants et les incitent à reconnaitre l’impact de leurs agissements sur la machine : son crées, images, échos…
Les artistes sont très volontaires pour diversifier les sources d’expériences. La sonorité globale atteint parfois une nature que je qualifierais de psychédélique (évocation de sons in-utéro), les enfants sont réceptifs et en aucun cas apeurés.
Dans une seconde phase, peut-être 20 minutes, les enfants sont nettement moins attentifs. Plusieurs d’entre eux s’agitent ou décident d’aller jouer dans la salle d’à côté. De plus, la salle choisie par les artistes dispose d’une piscine à balles qui finit par faire concurrence…néanmoins, ce n’est pas excessif, les enfants restent « raisonnables » dans leur désintéressement ce qui témoigne, je le crois, de l’attractivité de l’exercice.
L’équipe, quant à elle, se montre dans sa souplesse et plusieurs membres expriment un intérêt pour les divers dispositifs en les testant.
L’après-séance
Je demande un petit retour « à chaud » aux artistes en présence de Geneviève Fromentin. Il ressort de l’échange qu’il conviendrait de moins « charger » l’expérience. Peut-être faudrait-il moins d’outils dans la panoplie, ce qui provoquerait des explorations plus profondes de la part des enfants voire plus d’interactions. Ces-dernières pourraient être plus simples, plus directes.
Du reste, les nombreux fils et câbles peuvent être problématiques (risque de chutes d’enfants ou du matériel) ; les artistes précisent qu’un dispositif non-filaire est à l’étude, ce qui est une bonne chose.
J’ai questionné des membres de l’équipe sur le ressentis. Elles considèrent que le projet est très bien mais qu’il est important de bien choisir la salle (la piscine à balles…) et insistent sur le fait que l’après-midi est un temps complexe pour les enfants et peut-être pour elles aussi. J’ai pu entendre cependant que mener des activités les après-midi était quelque chose de bien. Je pense qu’elles auraient besoin que l’expérience se renouvelle pour percevoir des perspectives qui ne peuvent se révéler que par le vécu.
De façon plus générale, il me semble important à ce stade de sensibiliser les artistes à une réelle dynamique de co-construction. Non pas que je ressente une quelconque envie de « faire pour » de leur part mais je crois que pour eux la découverte de la petite enfance les incite à trop se projeter (« on va faire ça, puis ça, puis encore ça… »). Ceci est un signe évident de bonne volonté et de sérieux, malgré cela il me parait crucial d’engager un processus de cocréation qui nécessitera un lâcher-prise pour ceux qui maitrisent la technique. A défaut, le « risque » serait de voir poindre un très beau résultat mais qui pourrait manquer de liens entre les enfants, les professionnelles et les artistes. Il me semble que ce projet est, entre autres objectifs, une occasion de travailler la relation (ce mot a été prononcé à plusieurs reprises lors de la rencontre du mardi 08/01) dans l’institution via une intervention extérieure. Selon moi, accentuer volontairement la triangulation enfants-professionnelles-artistes ne pourraient être que bénéfique pour tous les acteurs.
Sébastien Ferrarini – Etudiant dans le master « Consultant-coach » ) Département des Sciences de l’Education d’Aix-Maseille. En stage d’étude dans le cadre du projet de la nouvelle vague.