Le réseau de “la nouvelle vague créative et artistique de la toute petite enfance” a proposé à ses éducatrices, deux temps forts pour penser leur positionnement dans ce projet complexe. Dans deux lieux artistiques (La Friche Belle de Mai et le Fonds Régional d’Art Contemporain à Marseille), nous avons pu réunir des éducatrices:
- en structure d’accueil,
- en animation d’un Relais d’Assistantes Maternelles,
- au sein des Maisons des Solidarités du Conseil Départemental.
Au total, 25 professionnelles reliées autour d’une même finalité:
Comment la créativité de l’éducatrice, en dialogue avec différents propos artistiques, permet-elle de renouveler les pratiques éducatives afin d’amplifier la liberté d’expression des tout-petits et des professionnelles?
Pour appréhender cette question, nous leur avons proposé un double dialogue avec des artistes:
Le 30 novembre 2017 à la Friche: nous avons dans un premier temps écouté chacune sur la représentation de leur fonction créative à partir de la métaphore du papier, matière essentielle du spectacle “Ce qui nous vient, c’est la curiosité pour le monde” du Théâtre de Cuisine vu dans l’après-midi à Klap, Maison pour la Danse.
Le 8 février 2018 au FRAC: nous leur avons proposé de présenter individuellement leur inventaire d’objets utilisés auprès des tout-petits qu’elles confieraient à un artiste pour démultiplier un processus. Elles l’ont ensuite projeté dans l’exposition “Inventaire d’inventions inventées” où des objets connus sont détournés, voire requalifiés au hasard des intentions loufoques des artistes!
Au cours de ces deux journées, il a été proposé aux éducatrices de s’inspirer du spectacle et de l’exposition pour créer collectivement des situations créatives. Ainsi avons-nous posé un des fondements du projet de “la nouvelle vague”:
La créativité individuelle, en résonance avec l’art, permet de créer collectivement de nouveaux espaces pour être ensemble…de nouveaux espaces du commun.
Qu’avons-nous appris de ces deux journées sur la relation entre l’art et la créativité de l’éducatrice?
- Les éducatrices sont en capacité de jouer avec les matières et les objets pour créer des univers imaginaires. Sans projet, la matière, l’objet sont réduits à leur fonction éducative. Avec un projet incluant l’art, la matière créée de la fluidité dans la communication, ouvre des espaces de lâcher-prise, véhiculent des valeurs et autorise la co-création avec les tout-petits.
- L’espace artistique de la Friche et du FRAC leur offre la possibilité de s’exprimer autrement , de dévoiler leur métier à partir de nouveaux registres (en mobilisant notamment leur capacité à écrire, à mettre en scène, à sténographier l’espace). Elles sont capables de proposer des performances, éloignées des esthétiques auxquelles ont les assigne.
- Les éducatrices osent faire dialoguer les disciplines artistiques. Là où la pratique d’un art spécialise les artistes, les éducatrices ont cette capacité d’inclure le chant dans la peinture, d’oser le mouvement dans le conte. Elles sont très proches des pratiques artistiques transdisciplinaires qui osent des langages déconstruits pour des nouveaux imaginaires.
- Le dialogue entre l’art et leur créativité permet de mettre en jeu autrement leurs valeurs professionnelles. L’art est le médium qui permet à la valeur professionnelle de se mettre en mouvement par un travail de création.
- Les éducatrices manquent d’espace pour inscrire leurs pratiques dans un travail de recherche. Le travail créatif et artistique leur permet d’inclure leurs valeurs dans un travail de recherche. “La nouvelle vague” est cet espace: “Je m’inspire pour respirer et j’aspire à partager”.
Ainsi, avons-nous pu élaborer les visées du projet des éducatrices dans la cadre de “la nouvelle vague”. C’est un projet de transformation, à l’image de la chenille vers le papillon pour revitaliser la fonction:
- Dépasser nos doutes, nos peurs, par le lâcher-prise pour que notre créativité poétise nos valeurs professionnelles présentes dans le rapport de Sylviane Giampino et transforme l’instant présent en poésie et en magie.
- Poétiser nos valeurs professionnelles par des protocoles créatifs d’accueil et de soins, appréhendés comme des médiums, des doudous, pour répondre aux besoins de l’enfant.
- Créer une documentation des différentes créations des EJE qui articulent leurs valeurs professionnelles, les besoins exprimés par les enfants par “différentes boites magiques” où la poésie est une pâte à modeler des doudous.
Nous proposons aux Éducatrices:
- D’investir les séminaires artistiques proposés par “La nouvelle vague”/
- De s’inspirer du projet “Bébé Tutu”avec le chorégraphe Philippe Lafeuille pour co-créer avec les professionnelles, la danse des “bébés tutu” et pour documenter les processus qui sont en jeu.
- De participer au projet de “L’amour de l’art”, piloté par la ville des Pennes-Mirabeau et le FRAC.
- D’inclure les EJE de la Maison de la Famille et les EJE du Conseil Départemental dans le projet NumériKcrèche sur les arts numériques, réponse à un appel à projets de la DRAC PACA.
Pascal Bély – Cabinet TRiGONE